S’il est une mauvaise nouvelle survenue en cette année 2024, c’est bien l’annonce par Malphas de mettre un terme à la publication de son fanzine, L'Antre des Damnés. Après vingt ans d’existence et trente sept chapitres, c’est donc la fin de ce qui était sans nul doute un des fleurons de l’underground français.
Au vu de l’immense travail accompli depuis des années et d’un contexte économique toujours plus défavorable à ce type de publication, on ne peut que comprendre et respecter la décision de son fondateur qui aura donné vingt ans de son existence à cette œuvre. Mais il faut bien le dire aussi c’est un douloureux euphémisme que d'affirmer que l’Antre nous manquera et qu’avec sa disparition le monde du black metal underground français ne sera plus tout à fait pareil. Il ne s’agit pas ici de dénigrer le travail d’autres excellents fanzines, mais bien de souligner que Malphas avait su allier le fond à la forme avec des articles approfondis et une présentation élégante.
Au menu de cet ultime chapitre, on retrouvera comme toujours des entretiens fleuves, à commencer par celui avec le groupe belge Serpent Antique dont le EP était sorti chez Transcendance Productions en 2022. Car l’Antre c’était cela aussi : paraissant une fois ou deux par an, le fanzine était de fait en décalage avec l’actualité. Certains en ronchonnaient, tout habitués qu’ils sont à l’immédiateté de la presse généraliste et des webzines. Pour d’autres, et c’est mon cas, l’Antre constituait justement le moyen de rompre cette temporalité et de prendre le temps de revenir et d’approfondir les choses. Comme une sorte de rituel, où au lieu de courir derrière l’actualité et les modes du moment, on prend au contraire le temps de se poser et de revenir en arrière.
Mais l’Antre avait aussi le nez pour débusquer de belles nouveautés, comme en témoigne la longue entrevue avec le sorcier du groupe Le Coven du Carroir dont j’ai eu l’occasion de dire quelques mots ici même. Pour compléter tout cela, on retrouvera aussi des entretiens, tout aussi creusés, avec Noirsuaire et Byrgenstow.
Autre fait saillant de l’Antre : sa capacité à embrasser les arts noirs de manière globale en ne se cantonnant pas seulement à la musique. Outre le fait que les photographies de couverture étaient l’œuvre de Malphas lui même, celui-ci interroge d’autres acteurs de la scène, ici le peintre (et ancien musicien), David Berbel.
Depuis quelques chapitres maintenant, un label était aussi mis à l’honneur, ajoutant en plus du fanzine, un cd avec les principaux groupes du dit label. Pour cette ultime publication, c’est France Black Death Grind qui s’y colle. On y apprend diverses choses : l’histoire et le fonctionnement de cette structure, la passion pour la scène extrême qui anime ses membres mais aussi le fait que la plupart des chroniqueurs sont libidineux ne servent à pas grand-chose, à part « que ça fait se pisser dessus les groupes »…
Outre les rubriques habituelles (avec un live report sur le Black Khaos Assault, la page Souvenirs et bien sur de nombreuses chroniques d’albums), ce numéro exceptionnel se voit rehausser d’articles de circonstance : un long entretien avec Malphas, l’âme damnée de l’antre, mais aussi quelques mots sympathiques de ses collaborateurs, des labels ou d’artistes ayant côtoyé le fanzine durant toutes ces années.
Quand se referme ce chapitre XXXVII sur l’habituel rubrique « Souvenirs », il y a un réel pincement au cœur en se disant que cette fois c’est vraiment fini. Une dernière et ultime occasion pour vous d’acquérir et lire cette ultime publication qui vient clore une longue histoire. Merci à Malphas et à tout ceux et celles ayant œuvré à ses côtés au cours de toutes ces années. Merci pour toutes ces découvertes, ces redécouvertes et ces heures, que dis-je, ces journées de lecture.
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