Voilà une bien belle surprise que nous a réservé une partie de la rédaction de Rock Hard avec ce Rituel entièrement dédié à la scène extrême. Au menu beaucoup de black metal mais aussi un peu de death, de doom ou de grind...
Mais mieux encore, certains articles s’aventurent au-delà de la musique et font que ce numéro embrasse les arts noirs dans toutes leurs dimensions : musicales bien sur mais aussi graphiques comme en témoignent, par exemple, la couverture et le long article consacré aux peintures de Maxime Taccardi. Un petit pied est aussi mis dans la littérature avec les marins de Houle.
Audacieux ce numéro n’hésite d’ailleurs pas à naviguer dans les différentes strates de l’underground consacrant plusieurs pages à des artistes assez connus du grand public comme JP Ahonen, créateur des personnages de Belzebubs tout comme en allant longuement interroger Malphas, qui vient de mettre un terme à son fanzine L’Antre des damnés (sur lequel on a d’ailleurs écrit un petit mot ici).
Rituel s’intéresse aussi aux labels qui sont aussi une incarnation incontournable de la musique extrême. Là encore la manière est intéressante car dans leurs choix les auteurs permettent de voir les évolutions subies par les labels depuis les années 90 jusqu’à aujourd’hui. L’entretien avec Philippe Courtois de Holy Records est ainsi très révélateur : véritable dénicheur de talents (Orphaned Land, Elend, Septic Flesh…), Holy Records était une figure de proue de l’underground avec ses groupes et son catalogue de vente par correspondance. En quelques années l’arrivée d’internet, de la gravure de cds et pire l’avènement du téléchargement et du streaming ont fini par miner tout ce travail. L’entretien avec Marie du label Transcendance vient compléter ce constat et montre comment de petites structures peuvent tant bien que mal s’adapter à ce contexte en proposant une alternative très pointue, qui va parler à un petit nombre de passionnés et produire des productions et coffrets de qualité en nombre limité. Dans le cas de Holy Records comme dans celui de Transcendance un maître mot : la passion.
Plus classiquement, on retrouve dans ce numéro un certain nombre d’entretiens avec des groupes ayant eu une actualité durant cette année 2024. On ne les citera pas tous mais le format varie, allant de deux pages à beaucoup plus... Pas mal de formations françaises sont au menu mais pas seulement. Dans tous les cas voilà qui nous change des habituelles vaches maigres car ici les entretiens sont fouillés, laissent beaucoup plus de place à la parole des artistes, sans compter que les questions sont vraiment pertinentes et amènent un éclairage presque inédit. Là aussi, la rédaction sait également sortir des sentiers battus, proposant un bel entretien croisé entre Vlad de Necrowretch (black death) et Wilhelm de A/Oratos (black metal gnostique).
Parce qu’on aime bien se replonger dans l’histoire de nos genres de musique préférés, on trouvera quelques pages abordant les trente ans de « Transylvanian Hunger » de Darkthrone, un passage en revue des albums de la formation autrichienne Summoning et diverses petites choses évoquant le passé ou le présent de différents styles : les vingt albums les plus marquants de la scène grind, les dix commandements doom death par Laurent Cholet (Mouning Dawn) et Frédéric Patte-Brasseur (Ataraxie). En bref il y a de quoi se régaler tout en satisfaisant différents sombres penchants...et nous à Utter Dark on aime bien ça…
On a été tout petit peu moins convaincu par la rubrique les 100 albums de metal extrême de l’année 2024. Outre le fait que c’est un marronnier qui rend les fins d’années un peu agaçantes, la réserve porte plutôt sur le fait que cette liste ne s’aventure pas beaucoup dans les tréfonds de l’underground et reste globalement dans la couche la plus évidente du metal extrême quand bien même on retrouve quelques pépites moins connues comme Déhà, Argile, Ecr.Linf, Grylle, Hyminbjorg, Moisson Livide ou Sans Roi (tous français ou francophones d’ailleurs..). Mais cessons de geindre la gueule pleine.
Ce tout petit bémol mis à part, les différents protagonistes de Rituel nous ont offert ce dont personne n’osait plus rêver : un magazine de 140 pages, magnifiquement illustré et mis en page, des articles roboratifs, comme en trouve hélas de moins en moins, pas de publicité pour casser la magie de la lecture...Si vous nous aviez dit un jour que Rock Hard ou une de ses émanations consacreraient plusieurs pages à Marie de Transcendance, à Malphas de l’Antre, on ne vous aurait probablement pas cru. Et pourtant...comme quoi on est jamais à l’abri d’une excellente surprise. Et si Rituel entend remettre le couvert avec un tel niveau qualitatif, on signe des deux mains et on vend volontiers notre âme au diable.
L & N
Utter Dark Webzine
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