
Style : black metal.
Label : Ván Records
Localisation : France
Sortie : 24 novembre 2024.
Il était plus que temps d’évoquer du groupe Omegaeternum depuis la sortie de « 1248 », son premier album sur le label Ván Records, en novembre 2024. Cette signature plutôt flatteuse, inhabituelle et même inédite, il me semble, pour un groupe français. L’avantage c’est la garantie d’évoluer dans un label hautement qualitatif, tant dans le choix de ses groupes que dans les supports proposés. L’inconvénient est peut-être une certaine sous exposition de ce premier opus en France, ce qui est un peu dommage compte tenu de son line-up et de la qualité du dit album.
Le line-up, parlons en car on retrouve aux manettes de ce projet des noms bien connus des amateurs de la scène black metal française. En tout premier lieu, Omegaeternum est un projet où l’on retrouve deux anciens membres d’une des formations les plus cultes de l’Hexagone : Nehëma. Le guitariste Sorghal sort ainsi d’un long silence discographique et endosse également le chant. Pour ce nouveau chapitre, il a rameuté un ancien membre live du groupe en la personne d’Arrawn qui s’occupe de la partie lead des guitares.
A ce socle savoyard ou alpestre, se joint un tout aussi solide socle breton avec Öberkommender666 (basse, backing vocaux) et Sistre (batterie), que l’on connaît tous les deux pour leur implication dans Les Chants de Nihil.
Cet album j’ai commencé à le découvrir en conditions live (fait rarissime) lors du Forest Fest 2024 en Suisse où le groupe jouait le premier soir. Et quelle soirée...puisque de véritables trombes d’eau s'étaient déversées durant tout le set ou presque d’Omegaeternum qui avait vaillamment tenu la barre. Durant ce set, plusieurs choses semblaient déjà se dégager : d’une Omegaeternum n’était pas une manière de ressusciter Nehëma quand bien même la marque des années 90 est présente, de deux : le groupe avait dans la musette des compositions complexes, de trois : c’était très bien en place et ça sonnait comme l’enfer.

L'attente était donc grande au moment de pleinement découvrir le fruit de ce qui a certainement été un long et dense travail de composition. Avec pas loin d’une heure et quart de musique au compteur dont plusieurs morceaux flirtant avec les quinze minutes, Omegaeternum n’a pas ménagé sa peine et affiche son ambition. L’album est long ? Oui et le temps nécessaire pour l’apprivoiser encore plus. Si vous attendez du black metal simpliste, vite ingéré, vite digéré, vite oublié passez votre chemin, « 1248 » n’est pas pour vous.
Pourquoi cette date en guise de titre d’ailleurs ? Car Omegaeternum ancre cet album dans un événement survenu à cette date en Savoie, à savoir l’effondrement du Mont Granier qui provoqua plus d’un millier de morts, quand bien même les chroniqueurs de l’époque en rapportait près de 5000, suggérant bien que l’impact de cet événement apocalyptique dépassait le simple cadre du rationnel.
Dans sa globalité, l’album frappe par sa densité, son sens du détail et une lancinance hypnotique. « 1248 » ne se veut absolument pas « catchy », il ne vous attrape pas par les cheveux pour vous traîner à lui, il est plutôt une longue invocation à laquelle on finit par répondre docilement. Il est de ces albums qu’on écoute quasi religieusement pour mieux se laisser imprégner par ses atmosphères imbibées de mélodies délétères qui vont côtoyer des chœurs mystiques ou une agressivité plus débridée à coups de riffs tournoyants et de blasts.
L’orientation choisie pour le son est d’ailleurs propice à une écoute immersive : un peu « sec », il ne joue pas la carte d’une surproduction artificiellement séduisante. Plus encore le mix est aéré et laisse respirer le travail musical de chacun. Au fil des écoutes, l’attention pourra se fixer, là, sur un riff hypnotique, ici, sur un motif mélodique où encore sur des lignes de basse bien audibles et joliment composées. On n’oubliera bien évidemment ni la batterie, ni le chant car vraiment chacun apporte sa pierre à l’édifice de manière conséquente pour construire un univers qui finit par vous englober totalement.
Par bien des aspects « 1248 » pourra paraître anachronique en ces temps où tout doit aller vite et être évident. Omegaeternum va totalement à contre courant de ces principes et déploie dans sa musique de multiples circonvolutions qui prennent le temps de s’insinuer peu à peu dans l’esprit au point d’en devenir parfois obsédantes. De là naît une grande partie de toute la noirceur qui transpire de cet opus. Mais loin de se contenter de dépeindre de mornes horizons, Omegaeternum sait placer de sévères banderilles à coup d’accélérations mesurées ou en alourdissant plus encore une atmosphère déjà bien chargée.
Morceau après morceau les lignes mélodiques, rythmiques, vocales s’entrelacent pour former un filet au maillage si fin et si solide qu’il sera bien difficile de s’en échapper. Un peu à la manière de la catastrophe dont il narre l’histoire, «1248 » vous tombe dessus sans guère de possibilité d’en réchapper.
Du haut de ses soixante douze minutes extrêmement denses, voilà une fresque musicale et historique qui toise les sommets du genre. Un disque qui en impose.
N - 9/10
Tracklist :
1. Ye, Incantation (01:21)
2. The Endless Quietus (07:16)
3. The Devious Deceiver (14:48)
4. 1248: The Symbols Swallower (08:12)
5. 1248: The Silent Tears of the Stone Giant (03:01)
6. 1248: Echoes from the Depths (09:35)
7. My Inner Decline (13:05)
8. In Outverse Slumber (14:42)
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